Mettons que deux types découvrent, en même temps, chacun de leur côté, la manière de voler jusqu'à la lune, juste
comme ça, en un clin d'oeil.
L'un choisit de breveter son truc à lui, de faire un copyright, et de vendre des licences pour
voler jusqu'à la lune. Des millions de consommateurs payent, achètent la licence, voyagent jusqu'à la lune, reviennent, et puis rien. Ce sont des consommateurs.
Le deuxième fait un autre choix. Il attend l'arrivée de la nuit, et emmène son amoureuse jusqu'à
la lune, juste comme ça, en un clin d'oeil. C'est le déclic. Elle est ravie, leur amour s'enflamme. Ils partagent leur découverte avec de plus en plus de copains. Et ils fondent
une joyeuse confrérie d'amis voyageant jusqu'à la lune toutes les nuits, comme ça, gratis.
Tel est l'enjeu des logiciels libres face à la puissance écrasante des géants de l'informatique
marchande, des marchands de logiciels.
Nous sommes en plein milieu d'une guerre, la bataille industrielle des NTIC, au milieu des armées
de logiciels brevetés, de formats sous copyright et de systèmes d'exploitation betonnés comme une prison. Ces hordes marchandes ne veulent que des consommateurs captifs, des gens
qui paient et se taisent. Des personnes dont l'imagination devient juste une extension en point doc d'un fichier. Et qui paient et paient encore, devenant finalement des personnes
brevetées jusqu'à la moelle, soumises à La Firme.
Au milieu de ce foutoir, une joyeuse confrérie d'amis a seméŽla graine de la
libertéŽavec linux, avec des logiciels libres qui se partagent et qui du coup appartiennent ou peuvent appartenir à tous. Qui se nourrissent de l'imagination collective, qui
s'améliorent au jour le jour sans pour cela obliger les gens ˆ à payer et repayer.
C'est une graine toute petite et apparement fragile que celle de l'informatique libre. Elle est
pourtant semée et la fleur grandit, sauvage, belle et saine au milieu d'un marché belliqueux. Des gens d'un peu partout l'arrosent, la soignent et la regardent. Des experts
informatiques comme ceux de l'ANFA font voler son pollen vers l'Afrique, vers le Sud, animés d'une « véritable utopie qui fonctionne », comme l'explique Rigobert Missinhoun. Des
ingénieurs comme ceux de ActifDPS, des nobles artisans, font et refont des ordinateurs au moindre coût pour qu'elle prenne racine.
Ils veulent la lune, et peuvent l'avoir, parce que les pétales des fleurs, cela vole très haut, surtout avec des bons
jardiniers. A l'oeil, sans licence.
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