Organisée par la délégation du Québec, la soirée Eh! bécoise marquait, le 23 août dernier, l’ouverture de l’Université Internationale d’Été dans la très inspirante salle des congrès située sur l’enchanteur site de l’INJEP, l’institut National de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire. Après avoir fait connaissance au cours de la journée, les jeunes représentants de différents pays ont profité de l’occasion pour partager avec leurs homologues le résultat des cogitations qu’ils avaient menées avant leur arrivée sur divers sujets qui les préoccupent et qu’ils souhaitaient aborder dans le cadre de l’événement Fragments
du monde.
Des participants du Bénin, de la Guinée, de l’Algérie ainsi que de trois régions du Québec ont livré leur
témoignage de manière originale dans une ambiance de grande convivialité. Des membres de l’équipe du quartier Parc Extension de Montréal ont introduit la soirée en proposant un regard
sur le rapport des jeunes à la norme à travers le résumé d’un texte de réflexion ainsi que par le biais d'un collage et d'une vidéo-fiction illustrant les pressions que vivent les jeunes pour
se conformer aux critères de la mode ainsi qu'au style de leurs pairs. Même si ce court-métrage a suscité plusieurs éclats de rire chez les participants, cette caricature a aussi
montré comment l’influence des normes peut amener certains à perdre leurs propres valeurs et identité.
Prenant le relais de la première équipe, un représentant du Bénin a ensuite ému l’assistance avec un poème
explosif. Mariant habilement le langage technique à celui des sentiments, l’auteur a invité ses compatriotes de la terre à se servir de l’opportunité offerte par les nouvelles
technologies de communication pour ``ramener ensemble leurs fragments afin de recoller le monde,`` ainsi que pour contribuer à ``démonter le désespoir afin de remonter l’espoir``.
Allant droit au cœur, ce message est comme venu sceller l’union entre les participants, qui ont éprouvé la sensation d’être rassemblés autour d’un défi porteur de sens et d’espérance…
Cette performance théâtrale a été suivie de la contribution des Québécois de Laval, surnommés ``les Tenaces``,
qui ont partagé leurs préoccupations face à diverses problématiques affectant les jeunes. Les représentantes de l’équipe ont exprimé leur inquiétude face à l’isolement qu’engendre la
pauvreté des jeunes, en particulier des jeunes mères. Du même souffle, elles ont dénoncé l’effet pervers de certaines politiques gouvernementales qui contribuent parfois à amplifier les
difficultés des jeunes (ex : coupures aux prestations de la sécurité du revenu pour les bénéficiaires qui retournent aux études). Elles ont aussi abordé le problème du manque d’information
sur les droits des jeunes, qui sont trop souvent confrontés à l’intimidation policière ainsi qu’à l’exploitation, par le travail entre autres. Enfin, elles ont expliqué comment le
manque de ressources entraîne plusieurs jeunes dans un cercle vicieux épuisant qui les déchire entre l’obligation d’étudier pour se projeter dans l’avenir et celle de travailler pour survivre
au présent.
Deux participants de la Guinée ont poursuivi la soirée en résumant des témoignages recueillis chez leurs
concitoyens à propos de la question de l’influence des médias sur la jeunesse. Tout en faisant ressortir les impacts positifs de la présence des médias dans les pays du Sud (il contribue à
l’ouverture d’esprit, au contact entre les cultures, à l’acquisition de connaissances, à la prise de parole publique, à la dénonciation de diverses injustices et à la reconnaissance de droits
humains, etc.), ils ont aussi sensibilisé leurs homologues de l’hémisphère Nord aux effets néfastes du pouvoir médiatique. À cet égard, ils ont montré comment l’image mythique projetée
par la télé (principalement américaine…) contribue à l’exode rural des jeunes Africains qui aspirent à adhérer à un mode de vie plus urbain et occidental. Ils ont aussi dénoncé
l’aliénation qu’entraîne la domination culturelle et qui amène les jeunes à délaisser, voire même à dénigrer, les richesses de leur propre patrimoine.
À la suite de ce témoignage, les Longueillois du Québec ont repris le flambeau en proposant un vidéo-reportage
sur le thème de l’argent. Sous le leit motiv de la célèbre chanson ``l’argent ne fait pas le bonheur, celui qui a dit ça est un vrai menteur``, les reporters ont interviewé plusieurs
jeunes qui ont exprimé un point de vue fort lucide sur les enjeux de la consommation. Considérant que l’argent impose une loi qui trop souvent instaure une barrière entre soi et les
ressources premières qui pourraient répondre à nos besoins, divers protagonistes ont évoqué l’urgence de freiner le phénomène de la sur-production et de recourir à la créativité ainsi qu’à la
solidarité pour mieux faire usage des richesses de la terre et de l’humanité.
La dernière intervention de la soirée a donné lieu à une synthèse brillamment ficelée et improvisée par une
représentante algérienne. Après avoir rapidement présenté le sujet sur lequel elle et son compatriote avaient travaillé pour la production d’un site web sur la Place publique des
Martyrs d’Alger (dans le cadre du concours Fragments du monde), cette participante a mis en relief les nombreux points communs entre les jeunesses des divers pays (discrimination,
manipulation médiatique, manque de place sociale, etc.) tout en soulignant l’ampleur des obstacles rencontrés par les citoyens du Sud. Par ailleurs, encourageant fortement ses confrères et
consoeurs à profiter de l’événement pour s’exprimer, elle a conclu en insistant sur l’importance de prendre la parole puisque ``dire oui, dire non, c’est déjà exister``.
En résumé, la soirée d’ouverture de l’Université internationale d’été de Fragments du Monde aura grandement
rempli son objectif en permettant aux jeunes de s’approprier une parole et de se rallier autour d’une motivation commune, celle de faire entendre cette parole au “monde
entier”. Enregistré sur pellicule photo, vidéo et sur bande audio, ce premier événement multimédia aura permis de briser la glace entre les participants mais aussi de
mettre une première pierre à l’édifice collectif que nous nous sommes donné pour défi de construire dans les 10 jours à venir… Enfin, avec le courant d’énergie qui nous a tous traversés
pendant cette rencontre (et pendant la fiesta interculturelle qui a suivi…), il n’est à point douter qu’au-delà des résultats concrets de notre effort commun pour la production du CDROM et du
site Internet, chacun de nous ressortira d’ici avec le sentiment d’être branché à un réseau international non seulement virtuel mais également bien réel ! Alors, bonne chance à
nous tous pour que soit fructueux notre séjour, et bienvenue à vous dans cet univers que nous avons hâte de vous proposer…
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